2ème édition du Qawafel Gathering : Zoom sur les outils et les mécanismes de soutien à l’internationalisation en Tunisie

Le 18 décembre dernier, la Fondation Tunisie Pour Le Développement a accueilli la deuxième édition du Qawafel Gathering, un événement majeur dédié à l’internationalisation des entreprises tunisiennes. Sous le thème de la Réglementation : outils et leviers pour l’internationalisation des entreprises tunisiennes , cette rencontre a rassemblé des experts et des acteurs de premier plan pour discuter des défis et des opportunités liés à l’expansion des entreprises tunisiennes sur les marchés africains.

Les invités de la 2ème édition du QG

L’événement a été marqué par la présence de plusieurs intervenants de renom :

  • M. Wahb Ouertani, président du Groupement CONECT INTECH;
  • M. Hichem Radoine, cofondateur et Senior Partner de Connecr’Innov, président de MT Link.
  • M. Ridha Mahjoub, expert en développement des exportations et des investissements en Afrique ;
  • Mme. Amel Mchirbi, Team Leader « Appui aux accords commerciaux avec l’Afrique AACA» – GIZ;

Ces experts ont partagé leurs visions et leurs recommandations pour aider les entreprises tunisiennes à se préparer et à réussir leur internationalisation.

Présentation de l’infographie des mécanismes de soutien à l’internationalisation des entreprises tunisiennes

M. Mohamed Salah Boulila, Managing Director de Mazam et modérateur de cette édition, a présenté la seconde infographie réalisée dans le cadre du projet Qawafel. Cette infographie met en lumière les principaux outils et mesures d’encouragement à l’internationalisation en Tunisie, les accords de libre-échange (notamment la ZLECAF et le COMESA), ainsi que le rôle stratégique du CEPEX dans l’accompagnement des entreprises tunisiennes à l’international.

M. Mondher Mansouri, Sous-directeur de FOPRODEX, a complété ce panorama en présentant les mécanismes de soutien financier mis en place par le CEPEX, avec un focus sur le fonds FOPRODEX. Il a expliqué que ce fonds offre une subvention de 50% sur les coûts du transport aérien et de 33% sur les coûts du transport maritime, terrestre et mixte pour les produits agroalimentaires et agricoles. Les participants ont toutefois souligné la nécessité d’adapter ces mécanismes aux spécificités des startups, notamment en simplifiant les procédures et en améliorant la communication autour des opportunités offertes.

Des discussions constructives : enjeux et solutions

Les discussions lors du panel ont permis de dégager plusieurs recommandations importantes pour favoriser l’internationalisation des entreprises tunisiennes.

M. Wahab Ouertani a insisté sur la nécessité pour les entreprises tunisiennes de rechercher activement l’information et de se préparer à être « matures et responsables ». Selon lui, la Tunisie a longtemps été un pays d’accueil, mais aujourd’hui, elle doit devenir un acteur plus proactif sur les marchés internationaux, en particulier en Afrique. Il a également souligné l’importance de la certification et de l’adaptation aux normes internationales, cruciales pour se développer à l’international.

M. Hichem Radoine a évoqué la difficulté d’accès à l’information pour les entrepreneurs tunisiens. Pour lui, il est plus facile d’exporter vers l’Europe que vers l’Afrique, ce qui souligne l’importance de structurer l’écosystème pour rendre l’information accessible à tous. Il a aussi rappelé que le coût de la prospection en Afrique reste élevé, et que des structures d’accompagnement comme Connect’Innov jouent un rôle central pour soutenir les entreprises dans cette dynamique.

M. Ridha Mahjoub a souligné que l’un des principaux défis en Tunisie réside dans l’accès à l’information, même pour des données basiques, qui restent souvent inaccessibles. Il a affirmé que la mise en place d’outils permettant de capitaliser l’information est devenue essentielle. Des plateformes telles que Trademap jouent un rôle clé dans ce processus, en fournissant des informations de marché cruciales pour les entreprises souhaitant s’internationaliser.

Il a également mis en lumière le potentiel de l’intelligence artificielle pour résoudre de nombreux problèmes administratifs, notamment dans le traitement des demandes liées au fonds FOPRODEX. Selon lui, l’introduction de l’IA permettrait non seulement de réduire les délais de traitement, mais aussi d’optimiser l’efficacité de l’accompagnement des entreprises dans leur démarche d’exportation.

M. Mahjoub a cité MANATEX, une plateforme numérique française, comme un exemple à suivre. Elle est dédiée à l’accompagnement des entreprises, notamment les PME, dans leur développement à l’international. MANATEX propose des outils pour élaborer des stratégies d’exportation, fournir des analyses de marché basées sur l’intelligence artificielle et concevoir des plans d’entrée sur de nouveaux marchés. L’objectif principal de cette plateforme est de simplifier et rendre l’expansion internationale plus abordable pour les exportateurs.

Concernant la participation des entreprises tunisiennes aux salons internationaux, M. Mahjoub a donné des recommandations pratiques pour garantir leur succès. Il a insisté sur la nécessité de se préparer au moins six mois à l’avance avant l’événement. Il a également précisé qu’il ne faut jamais partir seul à un salon : chaque entreprise devrait être accompagnée d’au moins deux ou trois personnes. L’un d’eux pourrait rester sur le stand, tandis que les autres se déplaceraient dans les allées pour collecter des informations, échanger avec d’autres exposants et poser des questions pour nourrir leur démarche. Enfin, M. Mahjoub a souligné qu’un suivi post-événement est crucial et peut durer jusqu’à six mois pour maximiser les retombées de la participation.

Sur un autre registre, M. Mahjoub a exprimé ses préoccupations quant à la transparence du processus d’évaluation du FOPRODEX. Selon lui, les critères d’éligibilité sont flous et il manque de communication sur le nombre d’entreprises réellement accompagnées par ce fonds. Il a également souligné que ce mécanisme semble davantage adapté aux grandes entreprises qu’aux startups, qui n’ont pas toujours les ressources financières nécessaires pour couvrir les frais de déplacement et autres coûts avant de recevoir un remboursement plusieurs mois après.

La ZLECAF : un levier pour l’internationalisation

Mme. Amal Mghirbi a souligné les avantages considérables offerts par la ZLECAF (Zone de Libre-Échange Continentale Africaine), qu’elle considère comme l’équivalent du Schengen européen pour le continent africain. Elle a précisé que, depuis sa ratification par la Tunisie, cet accord a permis d’harmoniser les règles tarifaires et de créer un cadre propice au développement des exportations tunisiennes. La ZLECAF représente ainsi une passerelle stratégique pour les entreprises tunisiennes souhaitant s’imposer sur des marchés africains clés.

Cependant, plusieurs défis restent à surmonter, comme l’ont souligné les participants. Parmi eux, l’existence de barrières non tarifaires et les difficultés d’obtention de certifications internationales nécessaires pour satisfaire les normes des marchés. Ces défis exigent un soutien accru pour accompagner les entreprises dans leur démarche de conformité aux exigences et pour leur permettre de tirer pleinement parti des opportunités offertes par la ZLECAF.

Mme. Mghirbi a également mis en lumière la plateforme Africa Trade Agreements, un site centralisant les informations relatives à la ZLECAF et au COMESA. Cette ressource permet aux entreprises d’accéder à des données essentielles pour améliorer leur présence et optimiser leurs stratégies sur les marchés africains.

Interview avec Bechir Benbrika, CEO Smart FarmTN

L’interview avec M. Béchir Benbrika a été l’un des moments forts de l’événement. Il a partagé avec passion l’histoire de l’internationalisation de son entreprise, mettant en avant des étapes clés de son parcours. Selon lui, la phase de prospection est essentielle, tout comme l’identification des acteurs stratégiques et des partenaires fiables dans les pays ciblés.

M. Benbrika a également souligné l’impact déterminant des programmes d’incubation auxquels il a eu accès, notamment le programme Agritech Tunisia, porté par STECIA International. Grâce à cet accompagnement structuré, son entreprise, SmartFarm, a réussi à s’implanter sur des marchés comme le Sénégal et la Côte d’Ivoire. Ces programmes ont joué un rôle clé en limitant les risques financiers et en facilitant les premières opérations internationales de l’entreprise.

Ce témoignage met en lumière l’importance des initiatives d’accompagnement pour aider les startups tunisiennes à surmonter les défis de l’internationalisation et à saisir les opportunités sur les marchés africains.

Les recommandations clés 

À l’issue de cette rencontre, plusieurs recommandations ont été formulées :

  • S’appuyer sur les outils d’intelligence artificielle pour optimiser l’accès à l’information et simplifier les démarches d’exportation,
  • Rechercher des certifications internationales pour s’assurer que les produits répondent aux normes des marchés ciblés,
  • Structurer et professionnaliser l’écosystème afin de rendre l’information accessible à tous, de manière transparente et équitable,

La 2ème édition du Qawafel Gathering a démontré que l’internationalisation des entreprises tunisiennes repose sur une combinaison de volonté politique, de soutien stratégique et de collaboration active entre les acteurs économiques. Avec des outils adaptés et une préparation rigoureuse, les entreprises tunisiennes peuvent pleinement exploiter les opportunités offertes par les marchés africains, en particulier grâce à des initiatives comme la ZLECAF. L’événement a ainsi posé les bases d’une vision collective pour transformer les défis en véritables leviers de croissance.

Publié le 10 Janvier 2025, par Aya OUERTANI

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