Le commerce intra-africain en plein essor : opportunités et défis pour les entreprises tunisiennes

L’année 2023 a marqué un tournant pour le commerce intra-africain, qui a atteint un niveau record de 192 milliards de dollars américains, soit une croissance de 7,2 %1 par rapport à l’année précédente. Cette dynamique positive, révélée par le rapport d’Afreximbank, témoigne d’une volonté accrue des pays africains de renforcer leurs échanges commerciaux. Toutefois, ce chiffre, bien qu’encourageant, reste modeste comparé aux niveaux observés dans d’autres régions du monde. En effet, le commerce intra-africain ne représente encore qu’environ 16,6 % des exportations totales du continent, un chiffre bien inférieur aux 68,1 % enregistrés en Europe. Cette situation s’explique par plusieurs facteurs, notamment la fragmentation des marchés, les infrastructures inadéquates et les barrières non tarifaires.2

COMESA et ZLECAF : Des catalyseurs pour le commerce intra-africain

Dans ce contexte, les accords de libre-échange tels que le COMESA (Marché commun de l’Afrique orientale et australe) et la ZLECAf (Zone de libre-échange continentale africaine) se présentent comme des leviers essentiels pour dynamiser le commerce intra-africain et offrir aux entreprises tunisiennes de nouvelles opportunités d’expansion.

Créé en 1994, le COMESA regroupe 21 États membres et une population de plus de 560 millions de personnes. Cet accord vise à promouvoir l’intégration économique en éliminant les barrières tarifaires et non tarifaires entre les pays membres. Il offre aux entreprises tunisiennes la possibilité de diversifier leurs débouchés, de réduire leurs coûts d’exportation et de bénéficier d’un cadre réglementaire harmonisé. Le COMESA, riche en ressources naturelles et en potentiel de consommation, constitue un terreau fertile pour les partenariats et les investissements dans des secteurs clés comme l’agroalimentaire, les services financiers et les technologies de l’information et de la communication.

Quant à la ZLECAF, lancée en janvier 2021, elle ambitionne de créer la plus grande zone de libre-échange au monde avec 54 des 55 États membres de l’Union africaine. Cet accord prévoit la suppression progressive des droits de douane sur 90 % des biens échangés sur le continent, ainsi que la libéralisation des services et la facilitation de la circulation des personnes et des capitaux. La ZLECAF représente une opportunité unique pour les entreprises tunisiennes de s’intégrer dans les chaînes de valeur régionales et de bénéficier d’une main-d’œuvre jeune et dynamique.

Le continent africain : un eldorado pour les entreprises tunisiennes

Le continent africain, avec sa population de plus de 1,4 milliard d’habitants, dont 600 millions de jeunes, représente un marché en pleine expansion pour les entreprises tunisiennes. La mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) vient renforcer cet attrait, en créant le plus grand marché libre du monde, estimé à 3 500 milliards de dollars. Cette dynamique est renforcée par une classe moyenne en constante croissance, dont le pouvoir d’achat ne cesse d’augmenter.3

L’Afrique du Sud, avec un PIB de 3 7324 milliards de dollars en 2024 selon le FMI, se distingue comme le plus grand marché du continent. Son économie diversifiée, s’appuyant sur l’industrie manufacturière, l’exploitation minière, l’agriculture et le tourisme, offre de nombreuses opportunités de partenariat.

Les prévisions sont prometteuses : les dépenses de consommation en Afrique pourraient atteindre 2 5003 milliards de dollars d’ici 2030, avec des secteurs clés tels que l’énergie et l’agriculture, qui devraient peser 1 0003 milliards de dollars d’ici là. Les entreprises tunisiennes, fortes de leur savoir-faire dans ces domaines, sont particulièrement bien placées pour saisir ces opportunités.

De plus, les investissements dans les Zones spéciales de transformation agro-industrielle, soutenus par la Banque africaine de développement et ses partenaires à hauteur de plus de 1,5 milliard de dollars, offrent un terrain fertile pour l’expansion et l’innovation. Ces zones, en favorisant la transformation locale des produits agricoles, créent de nouvelles chaînes de valeur et ouvrent de nouveaux marchés aux entreprises tunisiennes.

Les atouts de la Tunisie dans le commerce intra-africain

La Tunisie dispose de plusieurs atouts pour s’imposer sur le marché africain :

  • Un savoir-faire reconnu : L’industrie tunisienne, notamment dans les secteurs textile, agroalimentaire et pharmaceutique, bénéficie d’une expertise reconnue à l’échelle internationale.
  • Une position géographique stratégique : La Tunisie, située au carrefour de la Méditerranée et de l’Afrique, constitue une plateforme logistique idéale pour desservir les marchés africains.
  • Une main-d’œuvre qualifiée : Le système éducatif tunisien forme des cadres et des techniciens qualifiés, capables de répondre aux besoins des entreprises opérant sur le continent africain.

Défis à surmonter pour les entreprises tunisiennes

Malgré les avantages indéniables offerts par le COMESA et la ZLECAF, les entreprises tunisiennes doivent faire face à plusieurs défis pour tirer pleinement parti de ces accords. La complexité des procédures douanières, le manque d’infrastructures adéquates, et les disparités réglementaires entre les pays membres sont autant d’obstacles à surmonter. Par ailleurs, la concurrence accrue sur les marchés régionaux oblige les entreprises tunisiennes à renforcer leur compétitivité en misant sur l’innovation, la qualité des produits, et une meilleure connaissance des marchés africains.

Stratégies gagnantes pour l’internationalisation des entreprises tunisiennes

Pour saisir pleinement les opportunités offertes par le commerce intra-africain, les entreprises tunisiennes doivent adopter une stratégie d’internationalisation rigoureuse et bénéficier d’un accompagnement adapté. Il est essentiel de mener des études de marché approfondies pour identifier les niches et les segments de marché les plus prometteurs. De plus, les entreprises tunisiennes doivent renforcer leurs capacités en matière de logistique, de financement et de marketing pour s’adapter aux spécificités des marchés africains. Des partenariats stratégiques avec des acteurs locaux peuvent également être un atout majeur pour surmonter les barrières culturelles et réglementaires.

L’accompagnement est primordial à toutes les étapes de l’internationalisation. Les entreprises tunisiennes peuvent bénéficier du soutien d’organismes publics et privés, tels que les chambres de commerce, les agences de développement, les experts-conseils et les structures d’accompagnements privées. Cet accompagnement peut prendre différentes formes : connaissances des marchés ciblés, aide à la recherche de partenaires commerciaux, formation à l’export, financement, accompagnement dans les démarches administratives et douanières, etc. Un accompagnement personnalisé permet aux entreprises de réduire les risques liés à l’internationalisation et d’optimiser leurs chances de succès.

Enfin, il est crucial de se doter d’une stratégie d’internationalisation claire, avec des mesures clés, ainsi que d’une équipe commerciale compétente, maîtrisant les langues locales et disposant d’un réseau relationnel solide sur le continent. La formation continue des équipes commerciales est également essentielle pour les maintenir à jour sur les évolutions des marchés africains et les nouvelles réglementations.

1 https://www.afreximbank.com/fr/afreximbank-lance-le-rapport-2023-sur-le-commerce-africain/   

2 https://www.macmap.org/fr/learn/afcfta#:~:text=Le%20COMESA%20est%20plus%20flexible,mati%C3%A8re%20de%20cumul%20des%20intrants

3https://www.afdb.org/fr/news-and-events/press-releases/lafrique-est-le-premier-marche-frontiere-avec-un-enorme-potentiel-inexploite-dit-akinwumi-adesina-aux-investisseurs-coreens-64348

4https://www.bbc.com/afrique/articles/cprrzpvz3w9o  

Publié le 30 octobre 2024, par Aya Ouertani

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